Votre assureur vous veut du bien

Pondu le 29 juin 2010 - 9 commentaires

On mesure rarement tous les risques qu’on prend au quotidien. Tenez, rien qu’en sortant de chez vous vous pourriez vous faire renverser par un camion, vous faire attaquer par un extra-terrestre ou vous faire aplatir par un avion dont les moteurs sont tombés en panne et qui aurait le bon goût de venir s’écraser sur votre petite personne.

C’est pour cela que des gens forcément bien intentionnés ont inventé les assurances. Passons sur l’hypocrisie de ce milieu, dont la plus flagrante est que l’assurance-vie ne vous garanti absolument pas contre la mort. De toute façon il vous tombera toujours une tuile sur la tête qui ne sera pas couverte par la flopée d’assurances auxquelles vous aurez souscrites. Le calcul d’un assureur est simple, vous devez lui filer un maximum de sous qu’il essaiera de ne jamais vous rendre. De fait, personne ne vous souhaite autant de bonheur et de bonne santé que votre assureur, car moins vous avez de soucis moins vous lui coûtez.

Il est bien entendu que les assureurs n’ont pas affaire qu’à des gens qui vivront centenaires sans aucun souci, qui n’auront jamais d’accident de voiture ou d’infiltration d’eau dans le plafond, sans se faire cambrioler ou avoir un appareil qui tombe en panne. Le problème fut soulevé à l’Assemblée Générale du Club Secret des Compagnies d’Assurances en 1612, association regroupant la plupart des assureurs depuis l’invention de ce métier1. Le débat fut houleux, bien que très calme comparé au fameux Congrès Scientifique de l’Académie de Boston en 1902, pendant lequel on essaya de trancher la question de savoir qui était le plus balèze entre un éléphant et un rhinocéros2.

Un petit malin, fondateur d’une compagnie d’assurance assurant les autres compagnies d’assurances (ne rigolez pas, ça existe vraiment et c’est le principe de la réassurance) proposa la mise en place de clauses suspensives qui permettrait de filer par la porte de derrière en cas de réclamation de dédommagement de la part des assurés-clients.

Evidemment les clauses suspensives furent d’abord totalement farfelues. Parmi les milliers de contrat-types répertoriés dans les archives de la Bibliothèque Secrète du Club Secret des Compagnies d’Assurances3, on trouve notamment ces clauses rédigées par une compagnie peu scrupuleuse peu après cette assemblée :

Sont exclus des sinistres :

– Les accidents de circulation, quelque soit l’implication de l’assuré dans ceux-ci.

– Les sinistres survenus en dehors du domicile de l’assuré.

– Les intimidations et manœuvres de recouvrement commises par un usurier auprès duquel l’assuré a contracté un emprunt, quelque soit le niveau de violence exercé.

– Les condamnations à mort, quelque soit la culpabilité de l’assuré dans l’affaire qui a mené à prononcer cette condamnation.

– Les sinistres survenus à l’intérieur du domicile de l’assuré.

– Les rixes ou duels, quelque soit la volonté de l’assuré d’y participer.

– Les vols et pertes de marchandises, au titre que l’organisme assureur ne peut vérifier la bonne foi de l’assuré. Le principe de précaution s’applique alors et l’assuré est considéré comme fraudeur à l’assurance, à laquelle il devra des indemnités compensatoires pour fausse déclaration de sinistre.

Puis les Chefs d’Etat entreprirent de mettre un peu leur nez veiné de sang bleu (ils étaient tous rois ou empereurs) dans tout ceci, et de modérer un peu les ardeurs des assureurs envers leurs assurés, d’autant que même un roi doit être assuré. On se souvient tous du 1er mars 1720, où Frédéric de Suède alors Roi depuis un jour seulement se fit entarter par un Prussien revanchard. Malgré les réclamations du monarque, son assurance refusa de le dédommager pour le nettoyage de sa perruque pleine de crème pâtissière, sous prétexte que cet incident était survenu le premier jour du mois et que c’était une clause suspensive. Suite à cet évènement il fut décrété que les entartages seraient punis de mort4 et que les clauses suspensives devraient désormais être “raisonnables”,  sans quoi il y aurait des têtes qui tomberaient et sans aucune indemnité qui plus est.

Bien évidemment les assureurs firent “oui oui” de la tête avec un air contrit, et n’en firent tout de même qu’à leur tête. C’est ainsi que 290 ans plus tard j’ai trouvé la chose suivante sur mon contrat d’assurances de la banque chez qui je viens d’ouvrir un compte :

Je décerne donc le Prix Spécial de Globalement Inoffensif à l’auteur de ce contrat d’assurance bancaire. D’autant que cette clause ne veut rien dire, puisque tout atome a un noyau. Je rappelle tout de même que l’Univers est constitué d’atomes (qui sont eux même constitué de nucléons, eux-mêmes composés de quarks et de gluons), et qu’on ne mentionne pas dans la clause de quel noyau d’atome on parle. Ce qui permet virtuellement d’exclure n’importe quel sinistre puisque des désintégrations d’atomes, ça arrive tout le temps dans l’Univers.

Note du Rat de Bibliothèque à poils courts : En faisant mes recherches, j’ai découvert que cette mention apparaissait dans plusieurs contrats d’assurances. Je ne sais pas s’ils proviennent de la même compagnie à la base, mais l’ânerie est donc assez répandue.


  1. Les assurances existent depuis 4000 ans environ, on en trouve la trace chez les Babyloniens. 

  2. Les survivants jurèrent que plus jamais le Monde Scientifique n’aborderait la question, mais on sait tous que la question continue chaque année de provoquer des émeutes dans toutes les universités et colloques scientifiques. 

  3. Comme vous pouvez le constater, c’est une organisation qui cultive le culte du secret et de la discrétion. 

  4. Ce qui explique que ce phénomène ne soit revenu à la mode qu’après l’abolition de la peine de mort en Europe. 

Je voudrais la paix sur le monde, vite je commente !


Quelques utilisations du vuvuzela

Pondu le 23 juin 2010 - 8 commentaires

Grâce à la Coupe du Monde en Afrique du Sud, on a pu découvrir un instrument de musique fantastique : le Vuvuzela.

Les amateurs de football ont globalement trouvé que l’utilisation dans les stades de cet instrument à vent est assez pénible pour les oreilles. La Fédération Internationale de Football (FIA) a bien pensé à l’interdire, mais les Sud-Africains ont rétorqué que c’était une coutume locale. Interdire cet instrument aurait été un peu comme refuser à un Français le droit d’être de mauvaise foi. Ça ne se fait pas, un point c’est tout.

Non le vuvuzela ne sert pas à draguer.

Pour les rares personnes qui ne savent pas ce qu’est un vuvuzela, il s’agit d’une sorte de corne ou de trompe. En gros un tuyau dans lequel on souffle et qui sort une note monotone (au sens « une seule note »). Ne cherchez pas, ça ne fait rien d’autre. Vous ne deviendrez donc pas le prochain <insérer ici un nom de musicien super connu> car on ne peut tout simplement rien faire d’autre avec cet instrument qu’un seul son. Et encore, il faut souffler fort. J’ai personnellement testé la chose, et la seule réelle utilité que j’ai vu dans le vuvuzela c’est d’embêter les gens autour avec ce son puissant et désagréable. Mais pour vouloir être vraiment pénible il faut maîtriser l’engin, ce qui demande un peu d’entraînement. Tout est simple dans le vuvuzela, sauf son maniement.

Vous allez me dire qu’à part dans un stade, il n’y a pas trop d’intérêt à utiliser ce truc vu que ça n’impressionne pas les filles, ça ne rend pas riche et on ne peut pas trop cuisiner avec. Mais vous avez tort, car il y a plusieurs cas où cet instrument peut se révéler fort utile.

– Lors d’une manifestation : vous vous êtes laissé entraîné à manifester dans la rue pour, au hasard, une réforme des retraites dont vous savez qu’elle est nécessaire, inéluctable et que si on ne la fait pas maintenant, tous ceux qui ont moins de quarante ans ne partiront pas en retraite à 62 ans mais à 75. Mais le fait est que vous êtes là, dans le cortège, à vous dire que vous seriez mieux ailleurs. Soudain, un énergumène syndicaliste de la SNCF qui remonte le cortège se place derrière vous et se met à beugler des slogans communistes tout en agitant son tambourin. Autant dire que niveau nuisance sonore, il met la barre assez haut. Pas de panique, vous avez pensé à prendre votre vuvuzela. Le communiste bruyant n’est pas très observateur, sans quoi il aurait vite remarqué que vous vous trimballez avec cette trompe sud-africaine et qu’il valait mieux aller embêter le groupe de secrétaires un peu plus loin qui cancanent en se souciant fort peu des revendications sociales au cœur de cette manifestation. Tant pis pour lui, commencez à souffler et brisez-lui sans retenue les tympans.

– A l’Assemblée Nationale : je serai le premier à suivre les débats parlementaires si les députés pouvaient faire usage du vuvuzela pour manifester bruyamment leur opposition au type qui présente son projet de loi en vue de débloquer des fonds que l’Etat n’a pas pour un projet farfelu quelconque1. A l’heure actuelle ces mêmes députés sont contraints à faire de l’absentéisme, à lire le journal, à papoter ou à consulter leurs mails.

– Dans les toilettes : vous êtes sur un trône public et vous vous rendez compte que vous allez devoir être bruyant dans l’exercice de vos fonctions. Même si les progrès de la science et des comportements sociaux sont indéniables, il est toujours à l’heure actuelle délicat de flatuler sonorement, même dans un lieu prévu à cet effet. Pas de panique, sortez votre vuvuzela et masquez le bruit de vos vents avec celui qui sort de cet instrument si pratique2.

– Pour recycler un liquide : Le vuvuzela peut servir d’entonnoir géant, ce qui en fait un accessoire tout à fait indispensable pour les mécanos amateur de musique bruit. Attention cependant à bien le nettoyer si à la suite d’une vidange de voiture vous comptez re-souffler dedans.

– A la Poste : Vous attendez depuis un bon quart d’heure que le petit vieux devant vous ait fini de faire son dépôt d’argent, nous sommes en fin de journée, il fait trop chaud, vous avez envie de faire pipi et vous avez les pieds enflés dans vos chaussures. Le petit vieux devant vous vient de se souvenir qu’il voulait transférer de l’argent à son petit-fils. Et il se lance dans la justification de cette opération, ce qui est hautement inintéressant à vos yeux. Pas de panique : sortez votre vuvuzela et donnez un bon coup de corne. La situation devrait rapidement se débloquer, surtout si vous êtes plusieurs détenteurs de vuvuzela dans la file d’attente.

– Au Scrabble : je vous laisse imaginer le nombre de points qu’on peut faire avec un mot qui comporte deux ’v’ et un ’z’.

– Dans un repas de famille, dans un restaurant, dans un lieu public quelconque : un gros lourd à côté n’arrête pas de proférer des vulgarités qui tombent dans les innocentes oreilles de votre bambin. Préférant ignorer qu’il connait déjà en réalité la plupart des insultes proférées par ce gros type au rire aussi gras que sa ceinture abdominale, vous pouvez user de votre vuvuzela pour effectuer une censure en temps réel. Bien qu’un peu d’entraînement soir nécessaire pour être synchronisé avec des débordements de vocabulaire, vous arriverez vite à un résultat satisfaisant dans la mesure ou soit votre bambin deviendra sourd, soit le gros type finira par comprendre que ses blagues de cul vous importunent.

Il y a bien sûr des tas d’autres situations dans lesquelles l’usage d’un vuvuzela serait salvateur. Je vous invite à les ajouter en commentaires si vous en connaissez.

Note : on parle du vuvuzela parce que c’est l’instrument pénible du moment, mais il y en a plein d’autres. (Boulet a d’ailleurs fait une excellente planche de BD à ce sujet).


  1. Je pourrais mettre des exemples mais la liste serait tellement peu exhaustive que ça en serait ridicule. 

  2. Vous allez me dire que les gens ne seront pas dupes. Certes, mais la désagréable sonorité du vuvuzela suffira à les faire fuir, ce qui vous permettra d’être bien mieux à votre aise. 

Je voudrais la paix sur le monde, vite je commente !